Proposition de loi transpartisane contre les déserts médicaux

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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’enjeu des inégalités d’accès aux soins n’est pas nouveau. Depuis plusieurs décennies, la combinaison de facteurs démographiques et de politiques publiques soit inadaptées, soit insuffisamment volontaristes, a conduit à une croissance continue de la désertification médicale.

Chaque année, des médecins partent à la retraite sans être remplacés. La promesse d’égalité face à la Santé qui fonde notre modèle social est brisée pour de nouveaux citoyens, qui ne trouvent plus de médecin traitant et doivent attendre des mois pour obtenir un rendez‑vous chez le dentiste ou chez un spécialiste. Le sentiment d’abandon progresse. Retarder encore des mesures puissantes et efficaces, c’est risquer d’atteindre un point de rupture irréversible.

En termes d’accès aux soins, les inégalités entre les territoires sont flagrantes. En 2022, on compte trois fois plus de médecins généralistes par habitant dans le département le mieux doté que dans le département le moins bien doté en France métropolitaine. Cet écart de densité monte à 18,5 pour les ophtalmologues, 23,5 pour les dermatologues, et va même jusqu’à 33 pour les pédiatres. Dans la Creuse, il n’y a plus aucun dermatologue en exercice.

Selon les chiffres du Ministère de la Santé, la désertification médicale touche plus de huit millions de Français. Pour les 10 % de la population habitant les territoires où l’offre de soins est la plus insuffisante, il faut 11 jours pour obtenir un rendez‑vous avec un généraliste et 93 pour un gynécologue. Le temps d’attente atteint même 189 jours pour consulter un ophtalmologue.

La situation est d’autant plus préoccupante que la désertification médicale continue de progresser, d’abord du fait de l’évolution sur le long terme de la démographique médicale. Selon la DRESS, le nombre total de médecins actifs de moins 70 ans continuera à diminuer au moins jusqu’en 2025. Les territoires déjà victimes de sous‑densité, où les outils incitatifs ne suffisent pas à attirer de nouveaux médecins, continueront à être les plus touchés par la désertification médicale. Selon la Cour des comptes, en 2017, dans 45 départements où la population était en hausse, le nombre de médecins était, lui, en baisse.

Depuis le milieu des années 1990, le nombre de médecins formés ne fait qu’augmenter chaque année. En 2021, le seuil des 10 000 a été franchi. Sur la période 2021‑2025, le numerus apertus fixe l’objectif de 51 505 étudiants admis en deuxième année de médecine. Néanmoins, cet effort n’est pas suffisant et ne permet pas de contrer le vieillissement de la population ainsi que les nombreux départs à la retraite.

À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles.

De nombreuses politiques d’incitation à l’installation des médecins dans les zones sous‑denses ont déjà été mises en œuvre depuis les années 2000, qu’ils s’agissent du financement d’assistants médicaux, d’avantages matériels, des contrats d’engagement de service public (CESP) passés avec des étudiants, des maisons de santé ou encore du passage du numerus clausus à un numerus apertus.

Bien que ces mesures soient nécessaires et utiles, elles ne sont pas suffisantes pour lutter contre la désertification médicale. Selon la grande majorité des études réalisées sur le sujet, si les dispositifs de soutien financier aux étudiants en contrepartie d’engagements de service permettent en général d’accroître l’offre à court terme, les résultats à plus long terme sont beaucoup moins probants. Les incitations financières ne suffisent pas à attirer et retenir les médecins dans les zones sous‑denses, et l’impact de ces mesures est assez faible au regard des coûts qu’elles engendrent.

L’attache territoriale et le cadre de travail (travail en équipe, exercice collectif) sont des facteurs importants lorsqu’un médecin choisit son lieu d’installation. La décision d’exercer dans une zone sous‑dense peut être motivée par le lien que le médecin a développé avec ce territoire, soit parce qu’il y a grandi, soit parce qu’il y a été formé. Au‑delà de ces facteurs personnels, les conditions d’exercice et le fait de ne pas être isolé professionnellement sont de plus en plus déterminants dans le choix du lieu d’exercice.

Surtout, la régulation de l’installation est une mesure probante qui a déjà été mise en place dans plusieurs États comparables à la France. Au Danemark, les médecins généralistes doivent passer contrat avec les autorités régionales qui régulent la distribution géographique de l’offre médicale. En Allemagne, depuis le début des années 1990, un nombre de médecins pouvant être conventionnés avec l’Assurance maladie a été fixé pour chaque zone géographique. En Norvège, les généralistes sont en majorité sous contrat avec les municipalités.

Selon une étude de la DREES datant de décembre 2021, « ces quelques exemples montrent une distribution plus homogène dans certains pays qui régulent l’installation, sans que l’on puisse en tirer une conclusion générale, faute de pouvoir systématiser les comparaisons ». La régulation de l’installation ne doit pas être perçue comme une solution unique. Il faut qu’elle soit accompagnée d’une amélioration du cadre d’exercice pour former une politique globale.

La DREES indique que « la régulation de l’installation conduit sans doute à une distribution géographique plus équitable ». Malgré des résultats encourageants dans les autres pays, la régulation de l’installation des médecins n’a encore jamais été essayée en France. La dégradation de l’accès aux soins justifie aujourd’hui plus que jamais cette mesure de courage politique.

Face à l’urgence de la situation et au regard de l’importance du sujet de la désertification médicale pour nos concitoyens, il est nécessaire de relancer le dialogue et la recherche d’un consensus dans la lutte contre la désertification médicale.

C’est en ce sens que nous avons lancé, avec une cinquantaine de députés issus de l’ensemble des tendances républicaines de l’Assemblée nationale, un Groupe de travail transpartisan sur les déserts médicaux. Les réflexions et les débats ont été menés sous le signe de la concertation et du dépassement des clivages.

Après des échanges riches et l’audition de 81 personnalités issues de 38 organisations de médecins, d’internes, d’étudiants, d’élus, d’usagers et de professionnels de santé, le groupe de travail dépose la présente proposition de loi pour répondre avec efficacité aux inégalités d’accès aux soins. Les débats lors de l’examen du texte permettront, espérons‑le, de l’enrichir encore.

L’article 1er permet de flécher l’installation des médecins – généralistes et spécialistes – et des chirurgiens‑dentistes vers les zones où l’offre de soins est insuffisante.

Il crée une autorisation d’installation des médecins et des chirurgiens‑dentistes, délivrée par l’ARS. En zone sous‑dotée, l’autorisation est délivrée de droit pour toute nouvelle installation. Dans tous les autres cas, c’est‑à‑dire lorsque l’offre de soins est au moins suffisante, l’autorisation est délivrée uniquement si l’installation fait suite à la cessation d’activité d’un praticien pratiquant la même spécialité sur ce territoire. L’autorisation d’installation intervient après consultation, par l’ARS, de l’Ordre départemental des médecins ou de l’Ordre départemental des chirurgiens‑dentistes.

Il s’agit d’un premier pas dans la régulation de l’installation des médecins et des chirurgiens‑dentistes sur le territoire, qui permettra, à tout le moins, de stopper la progression des inégalités entre territoires.

La mesure vise à orienter l’installation des professionnels de santé vers les zones où l’offre est la moins dense par un aménagement du principe de liberté d’installation, qui continue de prévaloir.

Ce cadre nouveau doit évidemment être soutenu par les mesures d’incitation déjà existantes, notamment pour les jeunes médecins, au plan financier comme au plan professionnel. Les politiques d’incitation à l’installation des médecins dans les zones sous‑denses restent bien entendu nécessaires. Mais ces mesures ne répondent pas à l’urgence de la situation. Soit leur impact est trop faible compte tenu des moyens engagés – c’est le cas des incitations, qui coûtaient 86,9 millions d’euros par an à l’État en 2016 – soit il est à retardement, comme la réforme du numerus clausus dont les effets sur le nombre de médecins ne seront pas significatifs avant une décennie. Face à ce constat, il est nécessaire de pouvoir évaluer l’ensemble des dispositifs visant à inciter à l’installation des médecins libéraux et des chirurgiens‑dentistes dans les zones sous‑dotées.

L’article 2 impose (sauf, bien entendu, cas de force majeure prévus par décret : décès, maladie grave…) un préavis de six mois aux médecins, aux chirurgiens‑dentistes et aux sages-femmes quittant leur lieu d’exercice. Cette mesure doit permettre aux autorités d’anticiper la situation et de disposer du temps nécessaire pour s’organiser afin que l’accès aux soins continue d’être assuré. Il n’est pas rare qu’un médecin annonce son départ d’un territoire laissant, sous un mois, plusieurs centaines de patients sans médecin, et sans offre de soins à proximité de leur domicile.

L’article 3 acte la création, dans chaque département, d’un guichet unique d’information et d’orientation à destination des médecins, sous l’égide de l’agence régionale de santé et tel que prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. Ce guichet unique vise à simplifier les démarches administratives des professionnels de santé effectuées dans le cadre de leur projet d’installation. Il s’agit de créer un point d’entrée unique afin que les professionnels n’aient pas besoin de se déplacer dans chaque administration.

Ce guichet unique doit permettre aux professionnels de santé d’être accompagnés dans leurs démarches afin que leurs demandes soient bien prises en compte par les services compétents. Il a pour objectif d’augmenter sensiblement le recours aux différentes aides disponibles sur le territoire. Cette mesure vise à faciliter l’installation des médecins sur les territoires, notamment dans les zones à faible densité médicale.

L’article 4 propose de créer un indicateur territorial de l’offre de soins (ITOS), élaboré conjointement par les services de l’État en lien avec les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui dresse une cartographie précise, par bassin de vie, de la répartition de l’offre de soins sur le territoire français. Cet indicateur définit également, dans les zones les plus sous‑dotées, un niveau minimal d’offre de soins à atteindre pour chaque spécialité médicale.

Le travail de l’Ordre des médecins dans ses rapports annuels, et surtout l’accessibilité potentielle localisée (APL), calculée par la DREES, sont des outils instructifs et de bonnes bases de travail, mais ils manquent à la fois de visibilité et de reconnaissance. L’une des nouveautés de l’indicateur proposé est justement son objectif : orienter véritablement les politiques de santé. Inscrit dans la loi, il bénéficiera d’un travail concerté, d’une large diffusion et donc d’une dimension supplémentaire de puissance publique.

Outre la répartition des médecins généralistes et spécialistes, l’indicateur territorial de l’offre de soins devra être pondéré par les données démographiques et sociales des territoires. En effet, des facteurs comme l’âge, la prévalence des risques, le non‑recours aux soins peuvent nécessiter une offre renforcée. Les résultats de cet indicateur, mis à jour annuellement, dresseront donc une cartographie très fine des besoins médicaux sur le territoire.

L’objet de l’indicateur territorial de l’offre de soins est avant tout d’être un outil uniforme d’aide à la décision pour les agences régionales de santé, d’abord dans la mise en place de l’autorisation d’installation délivrée par les ARS et dans l’élaboration des politiques territoriales de santé, puis dans la création d’un véritable maillage du territoire à long terme. Il sera également d’une grande utilité pour appuyer le travail des communautés professionnelles territoriales de santé.

La seconde partie de l’article 4 précise que le directeur général de l’agence régionale de santé doit s’appuyer sur l’indicateur territorial de l’offre de soins afin de déterminer annuellement les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins ainsi que les zones dans lesquelles le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé.

Le directeur général de l’agence régionale de santé devra également fixer annuellement par arrêté l’offre de soins à pourvoir par spécialité médicale dans les zones caractérisées par une offre de soins particulièrement dégradée. Le but de cette nouvelle disposition est de donner un cadre d’application à l’article 10 de la présente proposition de loi, en renforçant le financement public de postes salariés de médecins dans les territoires où la situation est la plus dégradée (absence ou quasi‑absence d’une spécialité médicale à l’échelle d’un département entier, par exemple).

L’article 5 porte sur la formation des médecins. Il vise à donner la priorité aux besoins des territoires dans le conditionnement du nombre d’étudiants en deuxième et troisième années de premier cycle. Actuellement, l’article L. 631‑1 du code de l’éducation dispose que les capacités d’accueil sont déterminées annuellement par les universités en fonction, d’une part, des capacités de formation et d’autre part, des besoins de santé des territoires. Cet article permet d’établir une hiérarchie entre ces deux critères et insiste sur le fait qu’il est nécessaire de tenir compte en premier lieu des besoins de santé des territoires afin de répondre aux enjeux de la désertification médicale.

Les articles 6 et 7 permettent un meilleur accès aux études de médecine pour les étudiants issus des territoires qui possèdent un taux d’accès aux études de médecine particulièrement faible, ou caractérisés par une offre de soins insuffisante et par des difficultés dans l’accès aux soins.

L’égalité d’accès aux soins passe aussi par une égalité d’accès aux études médicales : nous devrons permettre à tous les enfants de France, quel que soit leur territoire d’origine, de prétendre à ce cursus sans se l’interdire pour des raisons de coûts, de distance ou de milieu social.

Dans cette perspective, l’article 6 prévoit d’ouvrir le contrat d’engagement de service public (CESP) dès le premier cycle des études de médecine aux étudiants issus d’établissements d’enseignement secondaire situés dans des territoires qui possèdent un taux d’accès à ces études particulièrement faible, ou caractérisés par une offre de soins insuffisante et par des difficultés dans l’accès aux soins. Actuellement, le contrat d’engagement de service public peut être conclu par un étudiant de médecine seulement à partir du deuxième cycle. Ce CESP “étendu” est donc fondé à la fois sur des critères territoriaux et sociaux, afin de démocratiser l’accès aux études de médecine.

L’article 7 prévoit la création d’Écoles Normales des Métiers de la Santé, à titre expérimental et pour une durée de six ans, ainsi que d’une année préparatoire aux études de médecine, à titre expérimental et pour une durée de trois ans minimum, dans dix départements caractérisés par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins.

Les Écoles Normales des Métiers de la Santé ont pour ambition d’être la référence sur nos territoires pour un environnement scolaire propice à une jeunesse souhaitant s’engager dans la prise en charge de la santé de nos concitoyens. Elles prennent la forme de lycées spécialisés et dispensent un enseignement spécifique aux métiers de la santé, tout en proposant des périodes de découverte en milieu professionnel.

Sur la base des anciennes Écoles Normales, dont les lois Ferry formèrent plusieurs générations d’instituteurs, les Écoles Normales des métiers de la Santé assureront le rôle d’ascenseur social face aux réticences générées par la longueur et le coût des études de médecine. Pour ce faire, ces Écoles Normales proposeront des études gratuites, un internat d’excellence et une bourse de vie. En contrepartie, les étudiants s’engagent à exercer sur le territoire pendant dix années une fois devenus professionnels de santé, faute de quoi, ils se verront dans l’obligation de rembourser les sommes perçues. Cet engagement de dix ans permettra d’augmenter considérablement le nombre de médecins s’installant dans des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins

L’année préparatoire aux études de médecine est une formation d’une durée d’un an proposant aux étudiants, immédiatement après l’obtention de leur baccalauréat, une remise à niveau en vue de l’entrée en Parcours d’Accès Spécifique Santé et du passage du concours d’accès à la deuxième année d’études de médecine.

Les mesures prises aux articles 6 et 7 permettront une meilleure accessibilité aux études médicales et inciteront par la suite les futurs médecins à exercer dans leur région d’origine.

L’article 8 propose la remise d’un rapport du Gouvernement sur les conditions de travail et le statut des externes et des internes en médecine. L’urgence de la désertification médicale nous impose de refonder le contrat entre la Nation et ses médecins, mais elle nous oblige aussi d’autant plus vis‑à‑vis des professionnels de santé. La création contestée de la quatrième année chez les étudiants en médecine montre bien la nécessité d’une réforme mieux définie et mieux concertée avec les premiers intéressés.

Faiblement rémunérés, parfois mal encadrés faute de praticiens disponibles, subissant souvent un rythme de travail éreintant, les internes ne doivent pas devenir une variable d’ajustement comptable de notre système de soins. L’engagement qui leur est demandé, pendant et après leurs études, justifie une revalorisation globale de leur statut et de leurs responsabilités. Le présent article propose également d’ouvrir une réflexion sur une régionalisation de l’internat et de renforcer les périodes d’apprentissage des internes en dehors des CHU, y compris dans les zones sous‑denses.

L’article 9 vise à favoriser l’installation durable des médecins sur le territoire en limitant à quatre ans la durée des remplacements en libéral dans la carrière d’un praticien. Les médecins remplaçants permettent de répondre à l’urgence de la situation dans les territoires les plus touchés par la désertification médicale. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une solution pérenne, et il est préférable d’inciter les médecins à exercer de façon permanente, en particulier dans les zones sous‑dotées.

Les articles 10 et 11 correspondent à la mise en application de la seconde partie de l’article quatre, qui définissait les zones où l’accès aux soins était particulièrement dégradé. Ces articles permettent de systématiser le financement public de postes de médecins salariés au sein de centres de santé dans les territoires où l’accès aux soins est particulièrement dégradé.

L’article 12 rétablit l’obligation de permanence des soins. Depuis la suppression de cette obligation, il est observé une dégradation de l’accès aux soins. Le principe du volontariat n’est en effet pas suffisant pour répondre à la demande de soins exprimée par la population sur le territoire. Le Conseil national de l’Ordre des médecins parle même de « désengagement des médecins libéraux ». Ainsi, seuls 38,1 % des médecins ont participé à la permanence des soins ambulatoires en 2019, ce chiffre baissant au fil des ans. Ce constat est particulièrement criant dans les déserts médicaux.

La dégradation de l’accès aux soins en ville a des conséquences dramatiques sur l’hôpital, et notamment les services d’urgence avec un quasi‑doublement des passages aux urgences en 10 ans, comme le relève la DREES. Or, selon la Cour des comptes, « environ un patient sur cinq qui recourt aux services d’urgence des établissements de santé aurait pu, sinon dû, être pris en charge par un médecin de ville ».

L’article 13 propose d’accompagner le développement de la profession d’Infirmier en Pratique Avancée (IPA) dans les zones où il est difficile d’obtenir un rendez‑vous avec un médecin dans des délais raisonnables.

Un accès direct aux IPA serait ouvert dans le cadre de protocoles de coopération définis par les soignants, afin de leur permettre de prendre en charge des soins primaires, en plus de pouvoir accompagner, sur demande d’un médecin traitant, des patients affectés d’une pathologie chronique. Une telle évolution vise non seulement à améliorer la prise en charge des patients mais aussi à soulager la charge de travail des médecins généralistes. Cette disposition ne pourra par ailleurs être appliquée efficacement que si l’accompagnement financier et matériel des IPA par l’Assurance maladie, notamment dans le cadre de leur formation, est renforcé.

L’article 14 facilite l’exercice des Praticiens à Diplôme Hors Union Européenne (PADHUE). Il s’agit d’accorder une reconnaissance nouvelle à ces médecins qui œuvrent quotidiennement dans les établissements de santé les plus isolés du territoire sans compter leurs heures.

La première partie de l’article modifie les conditions d’autorisation à exercer pour les PADHUE afin de faciliter leur installation dans les zones où l’offre de soins est particulièrement faible. Il permet au directeur général de l’agence régionale de santé d’autoriser par arrêté un médecin ressortissant d’un pays hors Union européenne à exercer dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins.

Le recrutement de praticiens formés en dehors du territoire national est indispensable afin d’augmenter le nombre de médecins exerçant en France. Actuellement, il est très restreint, alors même que certains PADHUE sont totalement francophones et ont fait leurs études dans des facultés de médecine très bien classées au niveau international. Aujourd’hui, plusieurs milliers de médecins étrangers diplômés hors de l’UE suivent un parcours de validation des acquis de l’expérience en France, et une part importante d’entre eux ont d’ores et déjà les compétences pour exercer la médecine de plein droit.

Cette première partie de l’article est inspirée du dispositif mis en place pour le département de la Guyane, où le préfet peut autoriser par arrêté le recrutement de médecins ressortissants de pays hors Union européenne.

Malgré les avancées de la loi n° 2019‑774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé sur les conditions dans lesquelles les PADHUE sont autorisés à exercer leur art, de trop nombreuses difficultés d’exercice sont constatées. Les délais de réunion de la commission nationale d’autorisation d’exercice sont excessivement longs, sans que les médecins concernés ne soient correctement tenus au courant de l’avancée de leur dossier. Dans l’attente de cette décision, ces médecins sont sous‑payés, sous‑indemnisés, ce qui décourage l’exercice en France. C’est pourquoi la deuxième partie de cet article instaure un délai de quarante‑cinq jours à compter de la demande d’autorisation d’exercice déposée.

L’article 15 supprime la majoration des tarifs à l’encontre des patients non pourvus d’un médecin traitant. Près de six millions de Français, dont 600 000 atteints d’affection de longue durée, n’ont pas de médecin traitant. La désignation d’un médecin traitant est souvent difficile, voire impossible pour les personnes habitant dans une zone où l’offre de soins est insuffisante. De ce fait, la majoration des tarifs à l’encontre des patients non pourvus d’un médecin traitant est une véritable double peine pour ceux qui rencontrent d’importantes difficultés pour se faire soigner. La suppression de cette majoration permettra aux patients qui ne parviennent pas à trouver de médecin traitant sur leur territoire de ne plus être sanctionnés financièrement dans leur parcours de soin.