100 ans de la mort de Pierre Brizon

Pierre Brizon, les 100 ans d’un vote héroïque

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LE DISCOURS QUE J’AI PRONONCÉ EN HOMMAGE À PIERRE BRIZON :
Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs, Chers amis de Pierre Brizon,

 

Ces deux journées, la journée d’études d’hier et la journée de commémoration d’aujourd’hui, marquent dignement le centième anniversaire de la mort de Pierre BRIZON.

Bravo à vous, bravo à votre association, de continuer à faire connaître le rôle historique de Pierre BRIZON, député de l’Allier, grande figure du pacifisme militant, qui fut l’un des 3 seuls députés français à refuser de voter les crédits de guerre en 1916.

Merci à vous de continuer à recenser, protéger et faire connaître les monuments pacifistes, antimilitaristes et républicains de l’Allier.

Et merci à vous de conjuguer tout ce travail au présent, pour perpétuer le message de paix et d’amitié entre les peuples par le refus de la guerre et la promotion des valeurs internationalistes.

Il en fallait, du courage en 1916, et il en fallait, de la conviction, pour braver une Assemblée Nationale quasi unanime, engagée corps et âme dans une guerre totale qu’il fallait à tout prix poursuivre, quel qu’en soit le coût, jusqu’à arracher une victoire qu’on voulait, elle aussi, totale.

Il en fallait, du courage et il en fallait, de la conviction, pour oser clamer « à bas la guerre », rappelant ainsi le fameux slogan « guerre à la guerre » utilisé par le mouvement ouvrier français et par Jean Jaurès dans ses plaidoyers pacifistes.

Pierre BRIZON s’est éteint brutalement, et prématurément, dès 1923.

Il n’a, sans doute, pas pu mesurer suffisamment combien ce combat pour la Paix, pour l’amitié et la fraternité entre les peuples, allait marquer tout le 20ème siècle, trouvant en partie son origine dans cette immense hécatombe que fut la Grande Guerre, et du souvenir douloureux de ces quatre années d’épreuves inouïes.

Ce profond courant pacifiste et internationaliste, revendiqué par les anciens combattants eux-mêmes, allait aussi trouver son prolongement 20 ans plus tard dans les mouvements de Résistance et de lutte contre l’idéologie et l’occupation nazie.

Je me félicite, à ce sujet, que ce soit un homme et une femme porteurs de ces valeurs humaines de paix, de fraternité, de partage, de lutte acharnée contre les injustices, de lutte contre la loi du plus fort, de lutte contre l’extrême-droite, qui fassent aujourd’hui leur entrée au Panthéon. Je parle de Missak MANOUCHIAN et de son épouse Mélinée, « ces étrangers et nos frères pourtant » comme l’a si magnifiquement écrit Aragon, et qui comme Pierre BRIZON ont refusé l’inacceptable.

Leur entrée au Panthéon, que nous étions nombreux à réclamer de longue date, est une bonne nouvelle. Et il faut s’en féliciter.

Mais il en manque d’autres au Panthéon, et notamment Henri BARBUSSE : un grand pacifiste, contemporain de Pierre Brizon, lauréat du Prix Goncourt en 1916 avec son livre « Le Feu », fondateur de l’Association Républicaine des Anciens Combattants et, avec Romain ROLLAND, du Comité Mondial contre la guerre et le fascisme en 1933.

Je sais qu’une campagne est lancée par les Amis d’Henri BARBUSSE et par l’ARAC pour obtenir l’entrée d’Henri BARBUSSE au Panthéon.  Et j’ai personnellement écrit, au début du mois de juin, au Président de la République pour appuyer cette demande.

Pas uniquement pour honorer Henri BARBUSSE, pour rendre hommage à ses combats et lui rendre justice devant l’Histoire.

Mais surtout parce qu’une telle entrée au Panthéon aurait du sens, pour aujourd’hui !

Tout se passe en effet aujourd’hui comme si on s’habituait à la guerre. Comme si on la considérait comme partie intégrante de la « marche du monde ». C’est vrai de la trentaine de conflits qui empoisonne la vie des peuples partout dans le monde. Et c’est vrai de la guerre en Ukraine, qui dure depuis bientôt un an et demi, et dont il est maintenant devenu habituel d’entendre « qu’il va falloir se faire à l’idée que ça va durer des années ».

Et, de fait, aucune réelle initiative de paix n’est mise en avant, y compris par les dirigeants de notre pays. On travaille à la guerre, on ne travaille pas à la paix.

Pire : on se prépare activement aux guerres à venir ! C’est ainsi qu’il faut comprendre les 413 milliards de crédits votés par l’Assemblée Nationale pour les 6 ans à venir. 413 milliards pour, selon les propres mots du Président de la République, « avoir une guerre d’avance ».

« Une guerre d’avance », au risque d’avoir « une paix de retard » !

C’est pour ne pas avoir cette « paix de retard » que l’héritage de Pierre BRIZON, celui d’Henri BARBUSSE, celui de Romain ROLLAND méritent d’être cultivés pour les générations d’aujourd’hui.

Vos deux journées d’étude et de commémorations y contribuent activement, soyez-en sûrs. Je vous adresse toutes mes félicitations, et vous assure de toute ma disponibilité pour faire prévaloir, ici comme à l’Assemblée Nationale, les logiques de paix et de coopération aux logiques d’affrontement et de concurrence entre les peuples.

Je vous remercie.